Face à l’apocalypse

17 03 2020

Ce titre peut paraître légèrement racoleur en période d’expansion du coronavirus. C’était en fait aussi le titre (« Face à l’apocalypse : ressources fictionnelles devant la fin d’un monde ») de la première section du deuxième chapitre du livre sorti en 2018 (Hors des décombres du monde). Comme une impression bizarre en repensant à cet intitulé, dont on n’imaginait pas qu’il puisse avoir une résonance aussi forte avec une actualité future… Ce moment où l’on se dit que tout un imaginaire de l’invasion zombie ne peut pas être sans influence… Il y a une espèce d’ironie à voir des livres comme ceux de Max Brooks, notamment son Guide de survie en territoire zombie (The Zombie Survival Guide, Three Rivers Press, 2003), figurer parmi les fortes ventes du moment sur certains sites de vente en ligne.

Essayons toutefois de prendre ces réactions autrement que comme un signe d’anxiété ou un réflexe de type survivaliste. Certes, ces fictions exposent la fragilité des infrastructures modernes et du relatif confort dans lequel nous vivons. Mais le monde ne disparaît pas ; il y a une vie qui reprend ensuite. Après tout, leur intérêt est aussi de montrer comment une société peut repartir sur de nouvelles bases, qui permettront peut-être d’éviter la répétition d’erreurs antérieures.

Quelle est la probabilité que les efforts collectifs s’orientent en ce sens ? Bonne question… Comment ne pas sombrer dans la panique générale ? Comment traiter collectivement et démocratiquement ce type d’épisode ? Coïncidence : un livre de l’anthropologue Christos Lynteris sorti il y a quelques mois (Human Extinction and the Pandemic Imaginary, chez Routledge) visait à montrer, en proposant la notion d’« imaginaire pandémique », comment la représentation d’une possibilité d’extinction humaine en cas de pandémie pouvait contribuer à refaçonner notre compréhension de l’humanité et de sa place dans le monde, autrement dit de ce que signifie être humain.

Les fictions (post-)apocalyptiques gardent l’intérêt de montrer les puissances d’agir qui restent ou peuvent être reconstituées dans des situations catastrophiques pour des individus ou des collectifs. Pas forcément réjouissant en période de confinement obligé, mais ce type de regard peut amener à les (re)lire différemment…

« Que lire alors ? », me direz-vous peut-être, puisque c’est devenu un des petits jeux du moment. Il se trouve qu’on m’a déjà posé la question pour Bibliobs et j’ai répondu en donnant une liste de 10 livres accompagnés de quelques mots d’explication pour chaque choix. Voici à nouveau cette liste qui comporte évidement beaucoup de romans de ce qui est presque devenu un genre à part entière, le « post-apo » (pour « post-apocalyptique »), mais aussi quelques détours du côté de l’uchronie et de la « hard science » :

Le monde enfin de Jean-Pierre Andrevon

La Terre demeure de George R. Stewart

Chronique des années noires de Kim Stanley Robinson.

Je suis une légende de Richard Matheson

World War Z, de Max Brooks.

Feed de Mira Grant

Station Eleven de Emily St. John Mandel

Bird Box de Josh Malerman

Le passage de Justin Cronin

L’échelle de Darwin et Les enfants de Darwin de Greg Bear


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4 responses

22 03 2020
marceldehem

« … comment la représentation d’une possibilité d’extinction humaine en cas de pandémie pouvait contribuer à refaçonner notre compréhension de l’humanité et de sa place dans le monde, autrement dit de ce que signifie être humain… »

Cette question n’ embarrassait pas tellement les conquistadores ni la cohorte de représentants de l’Eglise vis-à-vis des populations amérindiennes. Et ils restent tellement représentatifs de l’Esprit de la civilisation occidentale mondialisée que je me garderais bien d’un excès d’optimisme. Car qui tient les manettes du monde ? Les descendants des conquistadores…

22 03 2020
Yannick Rumpala

À rapprocher du fameux livre de Jared Diamond : Guns, Germs, and Steel.

22 03 2020
marceldehem

Merci de l’info. Je ne le connaissais pas. Bon confinement

16 04 2020
Fakh

Merci pour cet article. On pourrait ajouter « Ravage » de Barjavel ou « Route 666 » de Roger Zelazny.

Voici mon blog sur le sujet :

https://collapsofictions.wordpress.com/2019/09/23/mad-max-a-court-de-ressources/

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